L'OIT est une institution spécialisée des Nations-Unies
ILO-fr-strap
Plan du site | Contact English
> Page d'accueil > Triblex: base de données sur la jurisprudence > Par mots-clés du thésaurus > assurance maladie

Jugement n° 4670

Décision

1. Il n’y a pas lieu de statuer sur la requête en tant qu’elle tendait au remboursement des sommes indûment retenues sur les traitements versés à la requérante pour la période allant du 1er janvier 2013 au 7 mai 2019.
2. La décision du Secrétaire général d’Interpol du 25 août 2020 est annulée.
3. Interpol versera à la requérante une indemnité calculée comme il est dit au considérant 18 du jugement.
4. L’Organisation versera à la requérante des intérêts moratoires calculés comme il est dit au considérant 24.
5. Elle lui versera également la somme de 7 000 euros à titre de dépens.
6. Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
7. Interpol versera à l’intervenante une indemnité et des intérêts moratoires selon les modalités définies au considérant 29.

Synthèse

La requérante sollicite le recouvrement des montants qui ont été indûment retenus sur son traitement au titre de cotisations de maladie.

Mots-clés du jugement

Mots-clés

Requête admise; Négligence; Obligations de l'organisation; Remboursement; Assurance maladie

Considérant 6

Extrait:

Quant à la troisième fin de non-recevoir, tirée du caractère prétendument prématuré du recours interne introduit par la requérante, le Tribunal observe que l’Organisation n’est en tout état de cause pas recevable à la formuler devant lui dès lors que ce motif d’irrecevabilité n’avait pas été invoqué dans la décision du Secrétaire général du 25 août 2020.

Mots-clés

Estoppel; Recevabilité du recours

Considérants 10-11

Extrait:

Ayant décidé d’affilier ses fonctionnaires affectés en France au régime français de sécurité sociale en vertu de l’alinéa 1 de l’article 7.1 du Statut du personnel, Interpol a ainsi rendu le droit national de cet État applicable à la relation d’engagement entre l’Organisation et les fonctionnaires intéressés pour ce qui concerne leur protection sociale. Compte tenu de ce renvoi exprès à des règles de droit national, le Tribunal est, en principe, amené à s’y référer pour trancher le présent litige (voir les jugements 4401, au considérant 6, 3915, au considérant 4, 1451, au considérant 23, et 1369, au considérant 15). […]
Le Tribunal constate, au vu de ces éléments, que la question de savoir dans quelle mesure les montants de CMM portant sur la période 2009-2012 peuvent donner lieu à remboursement au profit des personnes qui s’en étaient acquittées soulève une question d’interprétation du droit national, dont la portée dépasse d’ailleurs largement le cas des fonctionnaires d’Interpol, qui ne saurait être tranchée que par les autorités et juridictions françaises. Il n’appartient donc pas au Tribunal de se prononcer sur cette question.

Référence(s)

Jugement(s) TAOIT: 1369, 1451, 3915, 4401

Mots-clés

Compétence du Tribunal; Droit applicable; Droit national

Considérants 12-13

Extrait:

[D]ès lors que le remboursement des cotisations litigieuses pour la période 2009-2012 n’apparaissait pas manifestement impossible au vu de la décision du Conseil constitutionnel français susmentionnée et des dispositions précitées du code français de la sécurité sociale, le Tribunal estime qu’il incombait à l’Organisation, à tout le moins, de demander expressément ce remboursement auprès de l’URSSAF ou des autorités publiques françaises.
[L]e choix d’Interpol d’affilier ses fonctionnaires à la sécurité sociale française ne la dispensait en rien des devoirs dont elle est investie vis-à-vis de ses fonctionnaires. S’il est vrai que l’Organisation n’a procédé à la retenue de la CMM qu’en application de ce qu’elle croyait, à tort, être la législation française applicable en la matière, il n’en reste pas moins qu’elle ne peut se retrancher ni derrière le fait qu’elle n’aurait été qu’un simple intermédiaire, ni derrière son statut d’organisation internationale n’ayant pas de responsabilité propre dans le cadre de l’application de cette législation. C’est en effet en vertu de l’article 7.1 du Statut du personnel que les fonctionnaires de l’Organisation sont, en règle générale, affiliés aux régimes obligatoires de protection sociale dans l’État de leur lieu d’affectation, à moins qu’il n’en soit décidé autrement par l’Organisation. Les fonctionnaires concernés n’ont donc aucun choix à cet égard et il est, en conséquence, abusif de vouloir leur imputer l’obligation d’entreprendre d’eux-mêmes des démarches, à les supposer possibles, auprès des autorités et juridictions françaises.

Mots-clés

Obligations de l'organisation; Droit national; Assurance maladie

Considérants 17-18

Extrait:

[I]nterpol a fait preuve, à de multiples titres, de négligence fautive, d’abord en ce qu’elle n’a pas pris les mesures nécessaires pour assurer un suivi efficace des évolutions du code français de la sécurité sociale, telles que celle résultant en l’occurrence de la censure partielle par le Conseil constitutionnel de l’article L. 131-9 de ce code, ensuite en ce qu’elle a ignoré la possibilité de remboursement rétroactif de cotisations indûment versées prévue par l’article L. 243-6 du même code et, enfin, en ce qu’elle s’est abstenue, même lorsqu’elle a ultérieurement entamé des démarches auprès de l’URSSAF et des autorités de l’État hôte, en 2019, en vue d’obtenir la restitution des montants prélevés sur les traitements de ses fonctionnaires au titre de la CMM, d’inclure dans ses demandes en ce sens ceux correspondant aux sommes prélevées pour la période 2009-2012.
Compte tenu de l’incertitude juridique [...] mise en évidence, que seules les autorités et les juridictions françaises pourraient lever, le Tribunal estime que la requérante a été privé, en raison de la négligence d’Interpol identifiée plus haut, d’une chance appréciable de bénéficier de la restitution des montants de CMM prélevés sur ses traitements au cours de la période 2009-2012. Dans les circonstances de l’espèce, il sera fait une juste réparation du préjudice résultant de cette perte de chance en condamnant l’Organisation à verser à l’intéressée une indemnité d’un montant équivalent à la moitié des sommes retenues sur son traitement afférent à cette période.

Mots-clés

Tort matériel; Négligence; Perte de chance

Considérants 20, 22-23

Extrait:

[I]l importe de rappeler que les intérêts moratoires ne correspondent qu’à une indemnisation objective du temps écoulé à compter de la date d’exigibilité d’une créance et que la simple constatation d’un retard de paiement de cette dernière suffit dès lors à en justifier le versement, que le comportement du débiteur ait été fautif ou non (voir les jugements 4093, au considérant 8, et 1403, au considérant 8). L’argumentation de la défenderesse tirée de la prétendue absence de toute négligence de sa part est donc, en tout état de cause, inopérante.
[...]
[E]n ce qui concerne l’absence de disposition du Statut ou du Règlement du personnel d’Interpol prévoyant le versement d’intérêts sur des sommes dues aux fonctionnaires de l’Organisation, le Tribunal ne peut que rappeler que l’obligation de payer de tels intérêts s’impose même sans texte en vertu des principes généraux régissant la responsabilité des organisations internationales.
Il convient, conformément à la jurisprudence du Tribunal, de faire application du principe selon lequel des intérêts sont dus de plein droit pour autant que la somme principale soit exigible, ce qui est notamment le cas lorsque des montants ont été retenus de manière indue sur une rémunération qui devait être payée à une date fixe. En telle hypothèse, le point de départ des intérêts à payer est l’échéance de chaque versement sur lequel une somme a été indûment retenue, cette échéance valant par elle-même mise en demeure (voir, notamment, les jugements 3180, au considérant 12, 2782, au considérant 6, et 2076, au considérant 10).

Référence(s)

Jugement(s) TAOIT: 1403, 2076, 2782, 3180, 4093

Mots-clés

Principe général; Intérêts moratoires

Considérant 27

Extrait:

Le Tribunal observe que la requérante ne précise pas le montant du tort moral qu’elle prétend avoir subi. S’agissant du préjudice lié au prélèvement indu de CMM, le Tribunal estime que la reconnaissance, dans le présent jugement, des négligences commises par l’Organisation suffit par elle-même à réparer le tort moral qui avait pu en résulter, sachant que le tort matériel inhérent à ces négligences sera également indemnisé, avec intérêts, dans les conditions ci-dessus exposées.

Mots-clés

Tort moral

Considérant 27

Extrait:

S’agissant du préjudice occasionné par la prétendue mauvaise foi d’Interpol dans le traitement du recours interne, le Tribunal estime que, si c’est à tort que ce recours avait été rejeté, comme il a été dit plus haut, il ne ressort pas pour autant du dossier que l’Organisation ait fait preuve de mauvaise foi dans le traitement de celui-ci.

Mots-clés

Tort moral; Charge de la preuve; Mauvaise foi

Considérant 29

Extrait:

L’intervenante se trouvant dans une situation de droit et de fait similaire à celle de la requérante, sa demande d’intervention est accueillie. Elle aura droit, en conséquence, à bénéficier de l’indemnité et des intérêts déterminés dans le présent jugement, dont le montant sera calculé en fonction de sa situation propre.

Mots-clés

Intervention; Intervenants



 
Dernière mise à jour: 16.01.2024 ^ haut